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RÉFLEXIONS OU SENTENCES
LXXVIII
L’amour de la justice n’est, en la plupart des hommes[1], que la crainte de souffrir l’injustice. (éd. 1*.)
LXXIX
Le silence est le parti le plus sur de celui qui se défie de soi-même[2]. (éd. 1.)
- ↑ L’édition de 1665 n’a pas ce correctif : « en la plupart des hommes. » — Cette pensée est un résumé des maximes 578 et 580. — Le cardinal d’Ossat (lettre 336, édition de Boudot), cité par Amelot de la Houssaye : « Ceux-là même qui n’ont point connu la vraie source de la justice ont néanmoins reconnu qu’il la falloit observer, et se garder de faire tort et injure à autrui, afin de n’en recevoir point. » — J. Esprit (tome I, p. 513 et 515) : « L’équité des personnes privées est une crainte qu’ils ont qu’on ne leur fasse des injustices. » — « La justice des particuliers n’est qu’une adresse qui tend à mettre leur vie, leur bien et leur honneur à couvert des injures qu’on leur peut faire. » — La Harpe (tome VII, p. 261) : « Je n’en crois rien du tout : c’est le cri de la conscience, c’est un sentiment qui précède toute réflexion. Il y a mille injustices que nous ne craignons pas de souffrir, et dont la seule idée nous révolte. »
- ↑ C’est encore là une des pensées que Vauvenargues (p. 84)
trouve communes. — Stultus quoque, si tacuerit, sapiens reputabitur ; et si compresserit labia sua, intelligens (Livre des Proverbes, chapitre XVII, verset 28). « Le sot lui-même, s’il se tait, sera réputé
sage ; et tant que ses lèvres seront closes, intelligent. » — Caton
(livre I, distique 3) :
Virtutem primam esse puta compescere linguam.
« Regarde comme la première vertu de retenir la langue. » — Publius Syrus :
Taciturnitas stulto homini pro sapientia est.« Pour le sot le silence tient lieu de sagesse. » — Montaigne (Essais, livre III, chapitre viii, tome III, p. 418) : « À combien de sottes âmes, en mon temps, a seruy vne mine froide et taciturne de tiltre de prudence et de capacité ! » — Voyez la 4e des Réflexions diverses.