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ET MAXIMES MORALES

CLXXXV

Il y a des héros en mai comme en bien[1]. (éd. 1.)

CLXXXVI

On ne méprise pas tous ceux qui ont des vices, mais on méprise tous ceux qui n’ont aucune vertu[2]. (éd. 1*.)


    rions le tort qu’ils nous ont fait dans l’esprit des autres. (1665.) — Mme de Sablé (maxime 16) : « Il n’y a pas plus de raison de trop s’accuser de ses défauts que de s’en trop excuser : ceux qui s’accusent par excès, le font souvent pour ne pouvoir souffrir qu’on les accuse, ou par vanité de faire croire qu’ils savent confesser leurs défauts. » — Mme de Sablé dit encore (maxime 6) : « Être trop mécontent de soi est une foiblesse ; être trop content de soi est une sottise. » — Voyez les maximes 149, 327, 383, 554, 609, la note de la maxime 315, et la 5e des Réflexions diverses.

  1. Selon l’annotateur contemporain, le nom de héros ne s’emploie jamais à mal. — Duplessis(p. 167) fait observer que l’auteur « a voulu dire simplement que le crime donne la célébrité comme la vertu. » — Peut-être la Rochefoucauld pensait-il, comme J. J. Rousseau (Discours sur la vertu la plus nécessaire aux héros), que la force d’âme est ce qui constitue le héros ; or cette force d’âme petit s’employer au mal comme au bien. — J. Esprit (tome II, p. 52) : « Ne pourroit-on pas… dire qu’il y a des héros en mal comme il y a des héros en bien, puisqu’on voit des gens avoir dessein de rendre leurs crimes et leurs forfaits illustres ? »
  2. Comme ce Crispinus dont parle Juvénal (satire iv, vers 2) :
    A vitiis monstrum nulla virtute redemptum.

    « Monstre que nulle vertu ne rachetait de ses vices. » — Var. : « On peut haïr et mépriser les vices, sans haïr ni mépriser les vicieux ; mais on a toujours du mépris pour ceux qui manquent de vertu. (1665.) — Les éditions de 1666 et de 1671, qui commencent comme celle de 1665, finissent ainsi : « mais on ne saurait ne point mépriser ceux qui n’ont aucune vertu. » — Le manuscrit disait plus vivement : « On hait souvent les vices ; mais méprise toujours le manque de vertu. » — La rédaction définitive ne date que de la 4e édition (1675).