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ET MAXIMES MORALES

que nous n’avons point de défauts, et que nos ennemis n’ont point de bonnes qualités ; mais, en détail, nous ne sommes pas trop éloignés de le croire[1]. (éd. 4.)

CCCXCVIII

De tous nos défauts, celui dont nous demeurons le plus aisément d’accord, c’est de la paresse : nous nous persuadons qu’elle tient à toutes les vertus paisibles, et que, sans détruire entièrement les autres, elle en suspend seulement les fonctions[2]. (éd. 4*.)

CCCXCIX

Il y a une élévation qui ne dépend point de la fortune : c’est un certain air qui nous distingue et qui semble nous destiner[3] aux grandes choses ; c’est un prix que nous nous donnons imperceptiblement à nous-mêmes ; c’est par cette qualité que nous usurpons les déférences des autres hommes, et c’est elle d’ordinaire qui nous met plus au-dessus d’eux que la naissance, les dignités, et le mérite même[4]. (éd. 4*.)

  1. Voyez les maximes 31, 267, 452, 458, 483 et 513.
  2. Var. : … c’est de la paresse : nous nous flattons qu’elle comprend toutes les vertus paisibles, et qu’elle ne nuit point aux autres. (Manuscrit.) — Dans les maximes 266 et 630, l’auteur est d’avis que non-seulement elle suspend, mais qu’elle détruit les vertus, en même temps que les passions. — Voyez aussi la maxime 512.
  3. Var. : c’est un certain air de supériorité qui semble nous destiner. (1675.)
  4. Mme  de Sablé (maximes 26 et 27) : « Il y a un certain empire dans la manière de parler et dans les actions, qui se fait faire place partout, et qui gagne, par avance, la considération et le respect ; il sert en toutes choses, et même pour obtenir ce qu’on demande. » — « Cet empire, qui sert en toutes choses, n’est qu’une autorité bienséante, qui vient de la supériorité de l’esprit. » — L’annotateur