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cet anneau rouge qui appartenait
au riche père de Halfdan.
De l’or se verra chez les convives
(cela convient aux vaillants héros),
quand nous demandons l’hospitalité
au milieu de la salle de Rân[1] ».


    certaines régions, on l’appelle Hlér (celui qui abrite. Cf. isl. hlé, ags. hleo, dan. loe, angl. lee) d’où dérive le nom de Hlésey (île de Hlér), auj. Laesö, dans le Cattégat. Ailleurs c’est Gymir (celui qui cache. Cf. isl. geyma, cacher ; ags gyman). Tous ces noms sont usités dans la langue des scaldes pour désigner la mer. De même que le casque d’or d’Odin est le ciel dans toute sa splendeur, de même que les nains se couvrent d’un casque de brouillard, ainsi le géant Egir porte un casque (aegishjálmr) formé d’épaisses ténèbres et de brisants qui se dressent jusqu’au ciel. Dans son poème épique Nordens Guder (ch. I), le Danois Oelenschläger a dépeint Egir en deux strophes fort remarquables. — Son épouse Rân (all. Raub, vol ; cf. raena, piller) est la femme sans cœur et sans délicatesse (sídlaus kona), emblème de la mer perfide qui réclame sa part dans les sacrifices de la vie humaine et des trésors. Elle tient un filet au moyen duquel elle entraîne au fond des mers tout ce qu’elle trouve à sa portée, ce filet que le malicieux Loki parvint un jour à lui dérober pour se saisir du nain Andvari et de ses trésors (Völsunga saga, ch. 14). Du mariage d’Egir avec Rán sont issues neuf filles, personnifications poétiques des vagues dans leurs différents aspects et propriétés. Kólga est la mer rageuse ; Bylgja, la houle ; Dúfa, la plongeuse ; Hravn, la spoliatrice ; Drafn, l’entraînement des flots ; Utha, la plaine liquide etc. Cf. R.-B. Anderson : Myth. scand. Trad. de M. Jules Leclercq (pp. 195-200). Paris 1886.

  1. La salle de Rân, le palais de Rân, le pays de Rân, la couche de Rân sont autant de métaphores pour désigner la mer. Il n’était pas bon d’y arriver les mains vides. De là cette coutume bizarre de se munir, en prévision d’un naufrage, avant de « s’en aller chez Rân », d’un cadeau de valeur (or, argent etc.), dans le but d’apaiser sa rapacité, tout comme les Grecs devaient avoir leur obole pour payer le nocher Charon. La fable de Rán rappelle la légende alle-