Page:La Saga de Gunnlaug Langue de Serpent, trad. Wagner, 1899.djvu/22

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modestes. Elle se borne à raconter, d’une manière détaillée, en un langage varié, imagé, pittoresque, mais en même temps simple, quelquefois naïf, souvent énergique, et avec les accents d’une admirable sincérité, les destinées des grandes familles scandinaves qui, pour se soustraire au despotisme de Harald aux beaux cheveux (861-931), quittèrent la Norvège et portèrent leurs pénates sur la lointaine terre d’Islande. Elle offre la peinture fidèle des vieilles mœurs et du vieux paganisme du Nord ; elle présente le tableau varié des occupations journalières, des aspirations morales, bref, de la vie si intense, si mouvementée de ces hardis émigrants qui, dès leur arrivée, se mirent bravement à l’œuvre, colonisèrent l’île, fondèrent un État indépendant ayant son organisation spéciale, ses lois propres et y développèrent en un temps relativement court une civilisation qui éclipsa bientôt celle de la mère patrie. La littérature y fleurit désormais libre de toutes entraves. C’est là que le génie scandinave prit son plus brillant essor ; c’est là aussi que naquirent la plupart des sagas.

Les faits rapportés par les sagas appartiennent pour la plupart à cette période de l’histoire qui s’étend depuis la colonisation d’Ingolf et de ses compagnons (874) jusque vers le XIe siècle : c’est ce qu’on peut appeler l’antiquité islandaise ou l’âge des sagas.

Les manuscrits nous en ont conservé près d’un demi-millier. Un grand nombre sont devenues la proie des flammes lors de l’incendie de la bibliothèque de Copenhague en 1728 ; beaucoup se sont effacées de la mémoire avant que l’on ait songé à les recueillir ; il en est plusieurs dont une indication fortuite ou une simple allusion ne nous a laissé que le nom. On les a classées de diverses façons, tantôt d’après les époques auxquelles on prétend en faire remonter la mise par écrit, tantôt d’après la situation