Page:La Saga de Gunnlaug Langue de Serpent, trad. Wagner, 1899.djvu/57

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Thorstein à la connaissance des lois et jouissant de l’estime de tout le monde. Gunnlaug et Helga se plaisaient à jouer ensemble aux échecs et ne tardèrent pas à concevoir une vive affection l’un pour l’autre, comme l’expérience le prouva dans la suite. Ils étaient à peu près du même âge. Helga était si belle qu’au dire de personnes bien informées elle a été la plus belle femme d’Islande. Sa chevelure était tellement abondante qu’elle pouvait s’en envelopper tout entière, et avait l’éclat de l’or ciselé[1] ; dans le Borgarfjord et bien loin dans les alentours il ne paraissait y avoir de parti qui pût rivaliser avec Helga la Belle.

Or, un jour que l’on se trouvait réuni dans la salle, à Borg, Gunnlaug dit : « Il y a encore dans la loi un point que tu ne m’as pas fait connaître : se fiancer à une femme. » — « Ce n’est pas bien long, » répondit Thorstein, et il lui exposa la manière de procéder. Alors Gunnlaug dit : « Tu vas voir si j’ai bien compris ; je vais saisir ta main et faire comme si je me fiançais à Helga, ta fille. » Thorstein répondit : « Cela me semble bien inutile. » Mais Gunnlaug saisit aussitôt sa main et : « Permets-le moi quand même, » dit-il. « Fais donc comme tu l’entends, » reprit Thorstein ; « mais tous ceux qui sont ici présents sauront que c’est comme si rien n’était dit et que nulle intention secrète n’est cachée là-dessous. » Ensuite Gunnlaug se fiança à Helga et demanda à Thorstein s’il avait bien procédé. Celui-ci reconnut que c’était bien fait, et cette scène procura beaucoup de plaisir à ceux qui y assistaient.

À Mosfell, dans le sud, demeurait un homme du

  1. Une chevelure longue et épaisse, surtout quand elle était d’un blond ardent (gult hár), était pour les anciens habitants du Nord, hommes et femmes, une véritable parure. Ils en étaient fiers et la soignaient avec goût et délicatesse.