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Page:La Saga de Nial, trad. Dareste, 1896.djvu/12

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la saga de nial

ments, ils tiennent ensemble et forment un tout. Chaque personnage, pris en lui-même, est peut-être plus remarquable que Njal, mais là encore c’est le comble de l’art, ou plutôt c’est la nature même que d’avoir su mettre chaque personnage à sa vraie place, en face des autres, pour laisser Njal s’élever au-dessus de tous. Voilà la vraie épopée. À côté de Njal est Bergthora. Elle s’attache à lui comme le flot qui vient laver le pied de la montagne. Elle aussi sent au fond du cœur le courroux et la vengeance, — peut-être l’auteur a-t-il pensé que telle est la nature de la femme, toutes les fois qu’elle s’épanche violemment au dehors, — mais c’est la vengeance contre un ennemi, contre une femme ennemie. Elle excite ses fils, mais elle met tranquillement sa tête sur le sein de son mari ; la volonté de son mari est pour elle une loi, et son unique plaisir est ce qu’elle voit dans les yeux de son mari. Si chère que lui soit la vengeance, elle ne se résoudrait jamais à faire tuer si elle ne savait que son mari s’y est déjà préparé, parce qu’il doit en être ainsi. Il le sait si bien qu’il a emporté avec lui au ting l’argent qui doit être payé pour les amendes.

Elle l’a suivi dans la mort, alors qu’elle était libre de sortir, que même son ennemi l’engageait à le faire, ne voulant pas avoir ce meurtre sur la conscience. Bergthora est généralement peinte en quelques traits, courts et frappants. Il n’en fallait pas davantage. Compagne de son mari, elle ne pouvait pas avoir plus de relief, et cependant nous la connaissons parfaitement. En effet, elle se révèle en quelque sorte dans son fils Skarphjedin. Celui-ci