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AVANT-PROPOS


que la conscience du vide universel, c’est-à-dire une non-conscience définitive^^1.

. Pour devenir Bouddha, le fidèle doit, avons-nous dit, acquérir les mérites (puṇya) et la connaissance (jñāna) d’un Bouddha. C’est la double provision, le double « équipement » (sambhâra). Par mérites, on entend surtout le « don » ou charité ; par connaissance, la science du vide : il semble que la contradiction soit flagrante. Mais, en psychologues affinés, les bouddhistes observent qu’il est impossible d’être charitable si l’on croit à la permanence, à l’existence du « moi » ; que, d’autre part, l’illusion de l’égoïsme est trop profondément enracinée pour que la vue abstraite du néant ontologique la détruise du premier coup : il y faut, non seulement un exercice répété (abhyâsa), mais encore un entrainement pratique, c’est-à-dire l’habitude de donner, l’habitude de se sacrifier au prochain. La science et la charité sont donc comme les deux ailes de l’oiseau ; elles se complètent et se perfectionnent réciproquement.

Le fidèle (bodhisattva) doit, d’abord, en présence de tous les Bouddhas et de tous les Bodhisattvas, faire vœu de devenir Bouddha pour le salut des créatures ; il applique toutes ses bonnes œuvres à cette intention, il pratique les vertus parfaites (pāramitās)^^2 qui sont la charité, œuvres spirituelles et temporelles ; la moralité, ou observation des lois prohibitives de l’ancien Bouddhisme ; la patience, tant à l’égard de la souffrance que des injures ; la science, c’est-à-dire la connaissance vraie du vide. Les vertus de force et de méditation, recueillement ou concentration de la pensée, servent à l’acquisition du mérite et de la science.

5. Comme son titre l’indique, « l’introduction à la pratique des bodhisattvas », développement du schéma qui vient d’être exposé,

1. Voir nos Études de Dogmatique Bouddhique, J. As. 1903, II.

2. C’est-à-dire les vertus qui vont de l’autre côté du samsara, qui vont au nirvana : telle, de sa nature la science (prajnâ). Les autres vertus sont des paramitas quand leur mérite est appliqué à l’acquisition de l’état de Bouddha ; elles sont dites pures et surnaturelles (lokottara) quand elles sont « parfumées » par le vide, quand, par exemple, la charité est pratiquée sans qu’on ait notion de l’aumône, de celui qui donne, de celui qui reçoit.