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Page:La Vie Ouvrière, année 1, 5 octobre — 20 décembre 1909.djvu/20

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sent d’exiger que le gouvernement les soutienne. Et il se trouve toujours quelque politicien plus ou moins désintéressé pour prendre en main leur cause au nom de « l’honneur national et des intérêts supérieurs de la Patrie ». C’est là précisément l’utilité de ces « courtiers parlementaires », députés ou sénateurs, anciens ou futurs ministres que l’on trouve dans les Conseils d’Administration de toutes ces Sociétés financières.

Donc, on s’adressa à notre diplomatie, et M. Delcassé négocia avec les cabinets de Londres et de Madrid un savant marchandage.

Afin de pouvoir à leur aise exploiter le Maroc, nos hommes d’Etat abandonnèrent aux Anglais le contrôle qu’ils exerçaient sur les finances de l’Egypte.

Mais les Anglais qui ne se souciaient pas de voir la France s’établir en face de Gibraltar exigèrent que l’on fit une part aux Espagnols, et cette part, ce fut précisément la région du Riff où l’on se bat aujourd’hui.

Il fut décidé que toute la côte qui va de Tanger à la frontière algérienne et tout le pays montagneux qui se trouve derrière, seraient réservés aux hommes d’affaires de Madrid. (Convention franco-espagnole du 6 octobre 1904 approuvée par le gouvernement anglais.)

C’est ainsi que le Riff — tout en restant marocain en théorie — passait comme on dit « sous le contrôle » de l’Espagne. Quant aux Marocains, naturellement, on ne leur avait pas demandé leur avis…

Cependant cet accord était pour le groupe Etienne et consorts une mauvaise affaire. Maintenant que les gisements convoités passaient sous le contrôle de l’Espagne, allait-on se retirer ?

C’est ici qu’il faut admirer la merveilleuse souplesse de notre organisme financier. Le groupe se fit, si j’ose dire, « naturaliser » espagnol. Ce ne fut pas difficile.