petites, gâtant tes enfants, gâtée par tes amis, et toujours, différente, et toujours la même, et surtout toujours la même pour ce : pauvre vieux mari qui t’aime si bien, qui t’aimera aussi longtemps qu’il aura un cœur. »
Il a horreur de l’emphase, et il donne un tour familier aux sentiments les plus délicats :
« Quand je ne t’ai pas auprès de moi, ma pauvre tête est comme un vieux château dont le concierge est absent et où tout est bientôt sens dessus dessous. »
Il garde sa bonne humeur au milieu de toutes les misères physiques et morales :
« Ma vie se passe en privations, en impatiences, en accidents, en inquiétudes ; tout cela prouve bien que ton pauvre pigeon est loin de toi. Prépare-toi à le bien consoler quand tu le reverras. J’ai laissé mon bonheur chez toi, comme on laisse son argent chez son notaire. »
M. Bardoux incline à croire qu’un mariage secret l’avait uni à madame de Sabran avant son départ pour le Sénégal. Dans ce cas, le mariage célébré en 1797 à Breslau, pendant l’émigration, ne serait, qu’une consécration publique de cette union.
De pareilles âmes à la fois frivoles et fortes, ironiques et tendres, ne pouvaient être produites que par une longue et savante culture. Le vieux catholicisme et la jeune philosophie, la féodalité mourante et la liberté naissante ont contribué à les former avec leurs piquants contrastes et leur riche diversité. Tels qu’ils furent, un Boufflers, une Sabran honorent l’humanité. Ces êtres fiers et charmants né pouvaient naître qu’en France et