Page:La Vie littéraire, II.djvu/388

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choses. Pour le ton général on s’inspirerait de la vieille et vénérable pièce dont je viens de parler. Le vers était volontiers prosaïque au XVe siècle. Il ne saurait l’être aujourd’hui. Peut-être conviendrait-il de le remplacer par de la prose chaque fois que parleraient des personnages humains. Seuls saint Michel, sainte Catherine sainte Marguerite, tous les saints, tous les anges, parleraient en vers et chanteraient des chœurs. Ils seraient visibles et présents, et révéleraient le sens mystique de l’action. Les chœurs des anges qui chantaient la musique de M. Gounod, autour du bûcher de Jeanne d’Arc, dans la pièce de M. Jules Barbier, ont fait un très bel effet à la Gaîté en 1873. Je voudrais que, cette fois, Michel, Catherine et Marguerite fussent tout à fait dans le goût du XVe siècle, que les deux saintes fussent des dames et représentassent l’âme de la vieille France. Il faudrait que toute la fleur de la poésie chrétienne sortît de leurs bouches et que leurs chants, d’un caractère religieux, fussent accompagnés par l’orgue. Quant à faire parler Jeanne d’Arc elle-même selon les lois d’une versification qui date de Ronsard, c’est ce qui choquera tous ceux qui aiment l’histoire avec délicatesse. Beaucoup de paroles de cette admirable fille nous ont été heureusement conservées. On ne peut les mettre en vers sans les défigurer, et ce serait grand dommage, car ce sont des perles et des joyaux de la plus pure langue française. Il faudrait seulement les rajeunir : le théâtre ne souffre pas les archaïsmes du discours. On est choqué d’entendre des vieux mots sur de jeunes lèvres. Pour