Page:La Vie littéraire, II.djvu/389

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qu’une telle œuvre fût menée à bien, la collaboration d’un poète et d’un savant ne serait point inutile. Enfin, la pièce que je rêve est une chronique dialoguée et accompagnée de musique ; car il faut joindre l’idéal au réel. C’est une œuvre vraiment populaire et nationale. Je ne veux point qu’elle soit, à proprement dire, une œuvre d’art. Je veux beaucoup plus et beaucoup mieux. Je veux qu’elle soit une œuvre de foi et qu’elle parle aux âmes. Je demande que, pour bien faire, les auteurs se fassent momentanément des hommes du XVe siècle et que, selon l’expression du Chatterton d’Alfred de Vigny, ils consentent à « raccourcir leur vue » .

Mais nous parlions des vieux poètes. Neuf ans après la mort de Jeanne, le prévôt de la cathédrale de Lausanne, nommé Martin le Franc, consacra à la glorification de l’héroïne un épisode de son poème le Champion des dames. Il est à noter que Martin le Franc était attaché au duc de Bourgogne, auquel il dédia son livre. Dans cet épisode, Jeanne est attaquée par un personnage dont le nom indique le caractère : il s’appelle Court-entendement. Elle est victorieusement défendue par Franc-vouloir. Ce fut elle, dit celui-ci,

 Ce fut elle qui recouvra
 L’honneur des Français tellement
 Que par raison elle en aura
 Renom perpétuellement.

Tous ces vers ressemblent à des châtaignes : ils on de la saveur, mais l’écorce en est épaisse et hérissée. En voici de plus faciles : Ils sont tirés des Vigiles du roi