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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/102

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Leurs amis et leurs seigneurs liges.
Plusieurs d’entre eux tombent à terre, évanouis.
Le duc Naimes se conduit comme un sage,
Et le premier, il dit à l’Empereur :
« Voyez, à deux lieues au-devant de nous,
Ces grands chemins d’où la poussière monte !
Il y a là un grand nombre de païens.
Chevauchez donc ! Vengez votre douleur !
— Dieu, dit Charles, sont-ils déjà si loin !
Accordez-moi et le droit et l’honneur :
Ils m’ont ravi la fleur de douce France. »
Le Roi ordonne à Gebouin et à Othon,
À Thibaut de Reims et au comte Milon :
« Gardez le champ, et le val, et les monts ;
Laissez les morts allongés comme ils sont,
Qu’aucune bête et qu’aucun lion n’y touche
Non plus que les écuyers et les garçons.
Je vous défends qu’aucun homme n’y touche
Jusqu’à ce que Dieu nous accorde de revenir en cette plaine. »
Et les barons répondent doucement, avec amour :
« Droit Empereur, cher Sire, ainsi ferons-nous. »
Ils gardent avec eux mille chevaliers.


CLXXXII

L’Empereur fait sonner ses clairons,
Puis, il chevauche, le vaillant, avec sa grande armée.
Ils trouvent la trace des gens d’Espagne
Et les pourchassent, d’une commune ardeur.
Quand le Roi voit que le soir tombe au ciel,
Il descend en un pré, sur l’herbe verte,
Se couche à terre, et demande au Seigneur
De bien vouloir en sa faveur arrêter le soleil,
De retarder la nuit, et de prolonger le jour.
Voici l’ange qui a coutume de parler à l’Empereur ;
Rapidement, il lui ordonne :
« Charles, chevauche, la clarté ne te fera pas défaut ;
Dieu sait que tu as perdu la fleur de la France,