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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/130

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Les païens disent : « L’armée de Charles est belle,
Nous aurons une rude et terrible bataille ! »


CCXLI

Vaste est la plaine et large la contrée ;
Les heaumes couverts de gemmes et d’or luisent,
Ainsi que les écus, les hauberts brodés,
Les épieux, les enseignes bien attachées.
Les clairons sonnent, et leurs voix sont très claires.
Hautes sont les notes prolongées de l’olifant.
L’Émir appelle son frère,
C’est Canabeu, le roi de Floredie,
Qui possède le pays jusqu’au Val-Sevrée ;
Il lui montre les dix colonnes de Charles :
« Voyez l’orgueil de cette France si comblée de louanges,
Avec quelle fierté chevauche l’Empereur ;
Il est par derrière, avec ses chevaliers barbus ;
Ils ont répandu leurs barbes sur leurs cuirasses,
Leurs barbes aussi blanches que neige sur gelée.
Ils frapperont de leurs lances et de leurs épées.
Nous aurons une rude et formidable bataille.
Jamais on n’en vit pareille d’engagée. »
Plus loin qu’un jet de bâton
Baligant dépasse ses compagnons
Et leur tient cette harangue :
« Venez, païens, je vous montre la route. »
Il brandit le bois de sa lance
Et tourne le fer du côté de Charles.


CCXLII

Charles le Grand, sitôt qu’il voit l’Émir
Et le dragon, l’enseigne et l’étendard,
Sitôt qu’il voit les Arabes en si grande force
Qu’ils occupent toute la contrée
Sauf le terrain qu’occupe l’Empereur,
Il s’écrie à haute voix, le Roi de France ;