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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/138

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Il pique son cheval, il lui lâche les rênes
Et frappe le païen qui portait le Dragon.
Tant qu’il écrase à terre devant soi
Et le Dragon et l’enseigne du Roi.
Baligant voit tomber son gonfanon,
Et l’étendard de Mahomet abandonné.
Alors l’Émir commence à s’apercevoir
Qu’il a tort et que Charles a le droit pour lui.
Les païens d’Arabie n’ont plus la même ardeur.
L’Empereur appelle ses Français :
« Dites, barons, pour Dieu, m’aiderez-vous ? »
Les Français répondent : « Le demander est une injure !
Félon celui qui ne frappe à outrance ! »


CCLXI

Le jour se passe et la soirée s’avance,
Francs et païens frappent de leurs épées,
Ils sont braves ceux qui rassemblèrent ces armées ;
Toutefois, ils n’oublient pas leurs cris de guerre.
L’Émir a crié : « Précieuse ! »
Et Charles : « Montjoie ! » la célèbre devise.
Ils se reconnaissent l’un l’autre à leurs voix hautes et claires ;
Tous deux se rencontrent au milieu de la plaine :
Ils se frappent, échangent de rudes coups
Avec leurs épieux sur leurs écus à rosaces.
Ils les brisent au-dessus des larges boucles,
Déchirent les pans de leurs hauberts
Sans arriver à se blesser au corps.
Leurs sangles se rompent, et leurs selles tournent,
Les rois tombent, les voilà à terre.
Vite, ils se remettent sur pieds.
Courageusement, ils ont tiré leurs épées.
Rien ne peut arrêter ce combat.
Seule la mort d’un homme y pourra mettre fin.