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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/149

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CCLXXXV

Les deux chevaliers sont à terre :
Vite, ils se remettent sur pied.
Pinabel est robuste, vif, et léger.
L’un cherche l’autre. Ils n’ont plus de chevaux.
De leurs épées à la garde d’or pur,
Ils frappent et refrappent sur les heaumes d’acier.
Ce sont des coups à fendre en deux les heaumes.
Les chevaliers français se lamentent fort :
« Ô Dieu ! dit Charles, fais éclater le bon droit ! »


CCLXXXVI

Pinabel dit : « Thierry, rétracte-toi,
Je serai ton homme lige par amour et par foi,
À ton plaisir je te donnerai de mon avoir.
Mais réconcilie Ganelon avec le Roi. »
Thierry répond : « Je n’y veux même pas penser ;
Honte à moi, si j’y consentais.
Que Dieu prononce aujourd’hui entre nous ! »


CCLXXXVII

Thierry dit : « Pinabel, tu es un vrai brave,
Tu es grand et fort, tu as le corps bien pris,
Tes pairs te connaissent pour ton courage ;
Eh bien ! abandonne ce combat.
Je t’accorderai avec Charlemagne,
Et on fera de Ganelon si bonne justice
Qu’il ne se passera pas un jour sans qu’on en parle. »
Pinabel dit : « Ne plaise au Seigneur Dieu !
J’entends soutenir toute ma parenté.
Je ne me rendrai à aucun homme mortel ;
J’aime mieux mourir qu’encourir tel reproche ! »
Ils recommencent à frapper de l’épée
Sur leurs heaumes gemmés d’or.