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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/25

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 « Allez vous asseoir sur ce tapis blanc
Et ne parlez plus, que je ne vous l’ordonne. »


XX

« Chevaliers francs, dit l’Empereur Charles,
Choisissez-moi un baron de ma terre
Pour porter mon message au Roi Marsile. »
Alors Roland s’écrie : « Ce sera Ganelon, mon beau-père ;
Si vous le gardez ici, vous n’en enverrez pas de meilleur. »
Les Français disent ; « Il s’en acquitterait fort bien. »


XXI

Et le Roi dit : « Ganelon, venez devant moi
Et recevez le bâton et le gant.
Vous avez entendu, ce sont les Français qui vous désignent.
— Sire, dit Ganelon, c’est Roland qui a fait tout cela.
Plus jamais je ne l’aimerai de ma vie.
Ni lui, ni Olivier, parce qu’il est son compagnon.
Ni les douze Pairs, parce qu’ils ont pour lui tant d’amour,
Et, sous vos yeux. Sire, je leur lance mon défi.
— Vous avez trop de rancune, dit le Roi ;
Vous partirez, puisque c’est mon ordre.
— J’y puis aller, mais je n’aurai pas plus de protection
Que n’en eurent jadis Basile et son frère Basan. »


XXII

« Je vois bien qu’il me faut aller à Saragosse,
Et qui va là-bas n’en saurait revenir.
Surtout, n’oubliez pas que j’ai pour femme votre sœur
Et que j’ai d’elle un fils, le plus beau qu’on puisse voir.
C’est Beaudoin, qui, s’il vit, sera un preux ;
C’est à lui que je lègue mes terres et mes fiefs.
Gardez-le bien, car je ne le verrai plus de mes yeux,
— Vous avez le cœur trop tendre, répond Charles ;
Puisque je vous le commande, il faut y aller. »