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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/68

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Sa trahison ne peut être cachée,
L’Empereur en tirera une grande vengeance.
Nous aurons une rude et terrible bataille.
Jamais homme n’en vit de pareille.
J’y frapperai de Durandal, mon épée ;
Vous, compagnon, frappez de Hauteclaire.
Nous les avons portées en tant de pays,
Avec elles nous avons parfait tant de batailles !
Aussi n’en doit-on pas chanter de méchantes chansons. »


CXV

Quand les Français voient qu’il y a tant de païens
Et que, de toutes parts, les champs en sont couverts,
Ils réclament souvent Olivier et Roland,
Et les douze Pairs, pour qu’ils soient leur rempart.
Mais l’archevêque leur dit son sentiment :
« Seigneurs barons, point de lâche pensée ;
Au nom de Dieu, je vous prie de ne pas fuir
Pour que nul homme de cœur n’en fasse une mauvaise chanson.
Il vaut bien mieux mourir en combattant ;
Il est certain que nous allons mourir ici.
Et qu’après cette journée nous ne serons plus vivants ;
Mais il est une chose dont je vous suis bien garant.
C’est que le saint Paradis vous sera ouvert
Et que vous y siégerez parmi les saints. »
À ces mots, les Français sont pleins de joie,
Et pas un d’eux qui ne s’écrie : « Montjoie ! »


CXVI

Il y a là un Sarrasin de Saragosse :
Une moitié de cette ville est à lui.
C’est Climorin, qui n’est pas homme de cœur.
C’est lui qui reçut le serment du comte Ganelon,
Et qui, par amitié, l’a baisé sur la bouche ;
Il lui donna même son épée ornée d’une escarboucle.
« Je veux, dit-il, couvrir la France de honte