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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/71

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Il monte un cheval qu’il appelle Saut-Perdu :
Pas de bête qui puisse le distancer à la course.
Il va frapper Anseis au milieu de l’écu,
Dont il lui coupe le vermeil et l’azur ;
Il lui rompt les pans de son haubert,
Et lui plonge au corps le fer et le bois de sa lance.
Le comte est mort, il a fini son temps.
Les Français disent : « Baron, quel malheur ! »


CXXI

Mais par le champ va Turpin l’archevêque ;
Jamais tel tonsuré ne chanta messe
Qui de son corps sut faire telles prouesses.
Il dit au païen : « Que Dieu te mette à mal !
Tu as tué celui que regrette mon cœur. »
Il fait prendre de l’élan à son bon cheval,
Et frappe Malquidant sur son écu de Tolède,
Si bien qu’il l’abat mort sur l’herbe verte.


CXXII

D’autre part est un païen : Grandoigne,
Fils de Capuel, le roi de Cappadoce.
Assis sur son cheval qu’il appelle Marmore,
Il est plus vif que n’est oiseau qui vole.
Il lâche la rêne, pique des éperons
Et va frapper Gérin, de toute sa force.
Il lui brise son écu, lui assène un terrible coup ;
Il lui a ouvert ensuite son haubert.
Il lui plonge au corps son enseigne bleue toute entière,
Si bien qu’il l’abat mort près d’une haute roche.
Il tue encore Gérier, compagnon de Gérin,
Et Bérengier, et Guyon, et Antoine,
Puis va frapper un riche duc : Austère,
Qui possède le fief de Valence, sur le Rhône.
Il l’abat mort ; les païens en ont grande joie.
Les Français disent : « Comme les nôtres tombent ! »