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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/77

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CXXXIII

Roland dit : « Notre bataille est rude ;
Je sonnerai du cor, et Charles l’entendra. »
Olivier dit : « Ce ne serait pas là du courage ;
Quand je vous le conseillai, compagnon, vous refusâtes.
Si l’Empereur était là, nous n’aurions pas subi une telle perte.
Ceux de là-bas n’en doivent pas être blâmés. »
Olivier dit : « Par ma barbe,
Si je puis revoir ma belle sœur Aude,
Vous ne coucherez jamais entre ses bras. »


CXXXIV

Roland dit : « Pourquoi cette colère contre moi ? »
Et Olivier répond : « Compagnon, c’est bien votre faute ;
Courage réfléchi n’a rien à voir avec démence,
Et mesure vaut mieux que folie.
Votre légèreté a perdu les Français.
Jamais plus nous ne pourrons servir Charlemagne.
Si vous m’aviez cru, notre seigneur serait venu,
Et nous aurions remporté cette bataille ;
Le Roi Marsile aurait été pris ou tué.
Votre prouesse aura de mauvaises suites.
Vous ne pourrez plus porter aide à Charlemagne,
L’homme le plus grand qu’on verra d’ici au Jugement dernier.
Quant à vous, vous allez mourir, et la France en sera honnie.
Aujourd’hui va prendre fin notre loyale amitié ;
Avant ce soir, notre séparation sera rude. »


CXXXV

L’archevêque entend leur querelle ;
Il pique son cheval de ses éperons d’or pur.
Vient jusqu’à eux, se met à les gourmander :
« Sire Roland, et vous, sire Olivier,
Je vous conjure, au nom de Dieu, de ne vous pas courroucer.