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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/79

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C’est merveille que Dieu le souffre si longtemps.
Déjà, il a pris Nobles sans votre commandement,
Les Sarrasins sortirent de la ville
Et livrèrent bataille au bon vassal Roland.
Mais lui fit laver à grande eau le champ ensanglanté,
Afin qu’il ne restât plus une trace.
Pour un lièvre, il va cornant toute la journée ;
Il est en train de plaisanter avec ses pairs.
Personne sous le ciel qui oserait l’attaquer en bataille rangée !
Chevauchez donc. Pourquoi vous arrêter ?
La Grande-Terre est encore loin devant nous. »


CXXXVIII

Le comte Roland a la bouche sanglante ;
Auprès de son front, les tempes sont rompues.
Avec douleur et peine il sonne l’olifant.
Charles et ses Français l’entendent.
Et le Roi dit : « Ce cor a longue haleine ! »
Le duc Naimes répond : « C’est Roland qui est en peine.
Il y a bataille, sur ma conscience.
C’est celui qui veut nous tromper qui l’a trahi.
Armez-vous, jetez votre cri de guerre,
Et secourez votre noble maison :
Vous entendez que Roland se lamente. »


CXXXIX

L’Empereur a fait sonner ses cors.
Les Français mettent pied à terre, et s’arment
De hauberts, de heaumes, d’épées à garde d’or.
Ils ont de beaux écus, de grandes et solides lances,
Des gonfanons blancs, rouges et bleus.
Tous les barons de l’armée montent à cheval.
Piquent de l’éperon en hâte durant la traversée des défilés.
Pas un d’eux qui ne dise à l’autre :
« Si nous pouvions voir Roland avant sa mort.
Nous frapperions avec lui de beaux coups ! »
Mais à quoi bon ? Ils ont trop tardé.