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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/83

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Ainsi les païens fuient devant Roland.
L’archevêque dit : « Voilà qui est bien,
C’est là le courage d’un chevalier
Portant ses armes et monté sur son cheval,
Il doit, dans la bataille, être fort et fier,
Sinon il ne vaut pas quatre deniers.
Et doit se faire moine dans quelque monastère.
Où il priera, sa vie durant, pour nos péchés. »
Roland répond : « Frappez, pas de quartier ! »
À ces mots, les Français reprennent la bataille,
Mais les chrétiens subissent de grandes pertes.


CXLV

L’homme qui sait qu’on ne fera pas de prisonniers
Fait, dans la bataille, une belle défense.
Aussi les Français sont fiers comme des lions.
Voici Marsile, tout ainsi qu’un baron
Sur son cheval qu’il appelle Gaignon ;
Il donne rudement de l’éperon et va frapper Bruvon
(C’est le seigneur de Beaune et de Dijon) ;
Il lui brise l’écu, lui démaille le haubert.
Si bien qu’il l’abat mort, sans plus de façons.
Puis, il a tué Ivoire et Ivon,
Et avec eux Gérard de Roussillon.
Le comte Roland n’est pas très éloigné ;
Il dit au païen : « Que le Seigneur Dieu te maudisse !
C’est bien à tort que tu m’as tué mes compagnons ;
Tu le paieras avant que nous ne nous séparions.
Et tu sauras aujourd’hui le nom de mon épée. »
Il va le frapper, en vrai baron qu’il est.
Et lui coupe le poing droit ;
Puis il tranche la tête de Jurfalen le Blond
Qui était le fils du Roi Marsile.
Les païens s’écrient : « À l’aide, Mahomet !
Ô nos dieux ! vengez-nous de Charles !
Il a peuplé cette terre de tels félons
Qu’ils mourront plutôt que de quitter le champ de bataille. »