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Page:La coutume d'Andorre.djvu/210

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De plus, la situation résultant du Paréage a été modifiée : des conventions plus récentes, des faits qui sont imparfaitement connus[1] et la pratique l’ont profondément altéré en ses dispositions essentielles. Même en ce qui concerne l’objet principal de l’acte, qui est de déterminer les rapports des deux Co-seigneurs, l’état de choses qu’il créa est depuis longtemps bouleversé : dans cet ordre d’idées, le Paréage répartit les revenus de la justice, il règlemente la levée de la taille à merci, il fixe les relations féodales des Co-seigneurs, hommage et rendableté, c’est-à-dire obligation de livrer, en paix comme en guerre, les places fortes du fief. Revenus de la justice perçus par la France, taille à merci, hommage, tout cela n’est plus qu’un lointain souvenir ; quant aux forteresses de l’Andorre, elles ne relèvent que de l’archéologue, et l’Évêque, qui n’a même pas un suisse à la porte de son palais, serait dans l’impossibilité de les occuper[2]. En un mot, du régime créé par le Paréage pour les Co-seigneurs il ne reste à peu près rien.

La portion de seigneurie du comte de Foix passa aux rois de Navarre ; Henri IV et Louis XIII l’incorporèrent à la couronne et elle fait partie de l’État français. Les rapports de la France avec l’Andorre furent suspendus au moment de la Révolution et rétablis par décret du 27 mars 1806.

Les évêques d’Urgel ont conservé leur co-seigneurie. À la vérité, ils ont quelquefois tenté de la convertir en une souveraineté exclusive ; l’un d’eux, Catalan de Ocon, donna même à ce sujet, le 2 mars 1762, un décret étrange et tout récemment, en 1894, Mgr Casañas a formulé une revendication plus intransigeante encore. Dans d’autres circonstances, au contraire, les Évêques ont hautement pro-

  1. V. Pièce justificative n° 11, un texte de 1305 duquel il semble bien résulter qu’à cette date l’Évêque était exclu de l’administration des Vallées.
  2. Je ne fais pas état de la neutralité de l’Andorre. Rien n’est plus curieux cependant que de suivre sur les textes le développement de cette idée que l’Andorre est un pays neutre : elle repose sur un véritable jeu de mots, ce qui n’a pas empêché les Andorrans de se prévaloir avec succès, à diverses reprises, de ce privilège.