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Page:La coutume d'Andorre.djvu/233

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qui se ressemblent entre elles incomparablement plus qu’elles ne ressemblent à leur commun ancêtre, le droit romain.

Un autre motif a dû pousser l’Andorre vers le droit « commun » : l’adoption officielle de telle ou telle législation équivaut, dans quelque mesure, à une déclaration de nationalité. Rien n’est instructif à cet égard comme l’histoire législative de la Catalogne aux xiiie et xive siècles : les rois d’Aragon proscrivant, en 1251, tout autre code que les Usages de Barcelone[1], imposant en 1278 et 1322, aux rois de Majorque l’obligation de faire observer par leurs sujets ces Usages, et abrogeant, en 1344, quand ils reprirent Perpignan, l’article 1er de la coutume de cette ville, qui rejetait ces mêmes Usages[2]. Dans leur crainte de se laisser assimiler par les deux nations voisines, les autorités des Vallées opposent le droit romain au droit français et au droit catalan[3].

Ces préoccupations, quelque légitimes qu’elles soient, ne sauraient l’emporter sur les faits. Or, c’est un fait incontestable que le droit supplétoire de l’Andorre est le droit catalan.

À l’origine de tout phénomène il faut, ici comme partout, une cause, et je ne vois pas quelle pourrait être la cause de la prééminence du droit romain, tandis que je m’explique très bien la prééminence du droit catalan.

Quand un peuple possède une loi formelle imposée par un législateur, il peut arriver que cette loi soit d’importation exotique. Tel n’est pas le cas de l’Andorre : le droit s’y compose à peu près exclusivement de traditions orales et de pratiques judiciaires ; dans ces conditions, la place occupée dans la société andorrane par une législation créée pour une société étrangère est nécessairement en rapport avec les affinités historiques de l’une et de l’autre société.

Nous pouvons donc affirmer a priori que le droit catalan

  1. Op. cit., p. xxxiv.
  2. Massot-Reynier, Les coutumes de Perpignan. Introduction, pp. xlv-xlvii.
  3. Voir p. 50, n. 3, la déclaration du Conseil général du 16 mars 1753.