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par l’Association, que comme une mesure transitoire. « Notre entreprise » écrivait en 1879 le colonel Strauch, « tend à l’établissement d’un puissant État nègre. » Mais Stanley s’opposa à la poursuite directe d’un but aussi difficile à atteindre. Il pensa que l’on devait se contenter, pour commencer, de créer des stations, qui deviendraient des foyers de civilisation et pourraient, si l’on y tenait, constituer de petites communautés souveraines, rattachées à une communauté plus vaste, sur laquelle le directeur général de l’œuvre aurait la haute main.

L’Association avait aussi nourri l’espoir d’organiser provisoirement les tribus habitant le voisinage de chaque station en « confédération républicaine de nègres libres, » dont le roi des Belges aurait nommé le président, résidant en Europe. Mais, sur ce point encore, Stanley combattit ses vues, prévoyant que les Africains seraient trop jaloux de leur autonomie pour se plier à un semblable régime. Plus tard, cependant, après sa première campagne, Stanley se montra partisan du système fédératif, et rédigea dans ce sens une espèce de constitution, qu’il fit accepter à Léopoldville, le 8 avril 1883[1], par les chefs et notables de cinquante-huit districts, situés au sud et à l’ouest du Stanley-Pool. Par cet acte, les signataires reconnaissaient la communauté de leurs intérêts, se constituaient en confédération, et confiaient au chef blanc de Léopoldville l’organisation de leur force armée collective, sans toutefois renoncer à leur indépendance. Ce traité, qui servit dès lors de modèle pour toutes les conventions à conclure avec les indigènes[2], devait familiariser ceux-ci, peu à peu, avec l’idée d’un gouvernement central, et il forme sans doute aujourd’hui encore, malgré la constitution, — plus prompte qu’on ne le prévoyait alors, — d’un État unitaire, la base

  1. Stanley, p. 624.
  2. Stanley, p. 341.