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LES THÉÂTRES

Je n’ai pu voir hélas la grande nouveauté delà quinzaine, là reprise, à l’Odéon, d’Antony, ce drame d’Alexandre Dumas qui passionna tant les contemporains, et qui crie et éclate comme une stridente fanfare à la tête du mouvement romantique. Et cela est si enlevé, si sûrement conduit par la main de ce grand maître du théâtre que le succès s’est imposé maintenant comme il s’imposa jadis. Cela vous porte, vous grise, et vous entraîne, et oubliant les exagérations de langage, ces grands gestes, ces cris désordonnés, vieillis à travers plus de trente années, l’on arrive haletant à la grande scène de la fin, ayant suivi l’auteur jusqu’au bout de ce drame étrange, qui n’est qu’un long duo d’amour en cinq actes.

Tous mes confrères de la presse grande ou petite ont proclamé le succès de l’œuvre que d’ailleurs les interprètes actuels, M. Paul Monnet et Me Tessandier ont vaillamment défendue. Et c’était vraiment plaisir à voir saluer le nom de ce pauvre cher grand homme, emporté dans la tourmente des années terribles, et s’en allant navré profondément de l’indifférence de ce public, qui l’avait tant aimé, et qui l’avait tant lu. Il a dû en tressaillir sur son siège de bronze, lui qui savait si bien ce qu’il valait. On s’aperçoit maintenant que c’était autre chose que le grand amuseur des foules, et que