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Page:La sainte Bible selon la Vulgate traduite en français, avec des notes par J.-B. Glaire. Nouvelle édition avec introductions, notes complémentaires et appendices par F. Vigouroux (1905).djvu/3041

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APPENDICE.


fleuve, aux eaux brillantes et limpides, qui nous transporte comme dans l’éternité, sur ses flots majestueux et en même temps doux et clairs. Dans deux passages seulement, il est dur, trouble, lourd, c’est liii et lvi, 9-lvii, 11a. Le premier reflète le sentiment de la tristesse, le second celui de la colère. Partout, du reste, se manifeste l’influence du sujet traité et des sentiments qu’il produit. Dans lxiii, 7, le prophète prend le ton du Tefilla (ou de la prière) liturgique ; dans lxiii, 19b-lxiv, 4, la tristesse entrave le cours de sa parole ; dans lxiv, 3, comme dans Jérémie, iii, 25, on entend le ton du Viddui (la confession) liturgique. » (Delitzsch.)

Relativement à son contenu, la seconde partie d’Isaïe est également incomparable. Elle commence par une prophétie, xl, 3-4, qui met dans la bouche de saint Jean-Baptiste le sujet de sa prédication ; elle se termine par la prophétie de la création d’un nouveau ciel et d’une nouvelle terre, comme la dernière page de l’Apocalypse qui, dans le Nouveau Testament lui-même, n’a pu aller au delà ; au milieu, lii, 13-liii, elle annonce les souffrances et la gloire de Jésus-Christ avec autant de clarté que si le prophète avait assisté à sa mort au pied de la croix et avait été témoin de sa résurrection. Ainsi, en commençant, il se place aux premières années du Nouveau Testament, comme les Evangélistes eux-mêmes ; il décrit ensuite la mort et la résurrection de Jésus-Christ, comme si c’étaient des faits accomplis et avec la même clarté que saint Paul dans ses Epîtres ; enfin, sortant de ce monde, il pénètre dans le ciel, comme l’Apocalypse de saint Jean, de sorte que, sans sortir des barrières où l’enferme l’Ancien Testament, il réunit, dans sa seule personne, l’évangéliste, l’apôtre et l’écrivain apocalyptique. Les souffrances du Messie, qu’annoncent plusieurs psaumes de David, sont ici prédites plus expressément encore. Dans Isaïe, il ne nous apparaît plus seulement comme roi et fils de David ; c’est le serviteur de Dieu, de Jéhovah, qui est tout à la fois roi et pontife, parce que, persécuté à mort par les siens, il s’immole volontairement, et Dieu le récompense de son sacrifice en le glorifiant et le rendant le sauveur de son peuple et des Gentils. Isaïe a légué à Israël ses sublimes discours pour qu’ils pussent le consoler au milieu de la captivité de Babylone. On les a comparés aux derniers discours que prononça Moïse dans la plaine de Moab et qui nous ont été conservés dans le Deutéronome ; bien mieux encore, aux discours de Notre-Seigneur, après la Cène, que nous lisons dans l’Evangile de saint Jean. Par leur élévation, leur profondeur, ils comptent en effet parmi les plus belles pages de nos Saintes Ecritures.

Note 24, p. 1953. — EXTERMINATION DE GOG ET DE SON ARMÉE,
Ezech., xxxviii-xxxix.

« Cette prophétie est une des plus difficiles de l’Ancien Testament, dit Calmet. Il y en a très peu qui aient plus partagé les anciens et les nouveaux interprètes. » Voici l’explication la plus vraisemblable et la plus communément admise aujourd’hui. — 1o Gog, roi de Rôsch (Vulgate : chef), de Mosoch et de Thubal, dans la terre de Magog, est un chef Scythe. Rôsch désigne une peuplade scythe qui habitait les environs du Taurus ; Mosoch et Thubal, les Mosques et les Tibaréniens des auteurs classiques. Gog réunit ses soldats, et, sur l’ordre de Dieu, les conduit du septentrion contre la Palestine ; il a dans son armée des habitants de presque tout le monde ancien : des Perses, des Ethiopiens et des Lybiens, des fils de Gomer et de Thogorma, c’est-à-dire des Cimmériens et des Arméniens, xxxviii, 1-9. — 2o Son but est de piller et de dévaster la Terre Sainte redevenue prospère, 10-16. — 3o Mais cette invasion de barbares ne servira qu’à apprendre aux païens quelle est la puissance du vrai Dieu, car il anéantira la formidable armée de Gog, 17-23. — 4o Elle périra sur les montagnes d’Israël, xxxix, 1-8. — 5o Il faudra aux habitants sept années pour brûler les armes des morts et sept mois pour ensevelir leurs cadavres, pendant que les oiseaux de proie se rassasieront de leur chair, 9-20. — 6o Toutes les nations apprendront ainsi que si Dieu a puni son peuple et l’a livré aux païens, parce qu’il avait péché, il s’est maintenant réconcilié avec lui et ne l’abandonnera plus, 21-29. — Gog est la figure des ennemis et des persécuteurs de l’Eglise, Apoc., xx, 7.

Dans les dernières années du viie siècle avant J.-C., les Scythes avaient fait dans l’Asie occidentale une invasion formidable qui avait rendu leur nom redouté et exécré. Chassés des montagnes du Caucase, qu’ils habitaient, par les Massagètes, ils


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