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Page:La sainte Bible selon la Vulgate traduite en français, avec des notes par J.-B. Glaire. Nouvelle édition avec introductions, notes complémentaires et appendices par F. Vigouroux (1905).djvu/3056

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APPENDICE.


Raguel donne le nom de frère à Tobie, son véritable cousin (vers. 2). Dans le même livre, viii, 9, le jeune Tobie, parlant à la fille de Raguel, qui était simplement sa cousine, lui dit : Ma sœur. On peut voir d’autres exemples dans le Lévitique, xxv, 48 ; Deutéron., ii, 4, 8, etc. Pour n’en citer qu'un seul pris d’un autre peuple, nous ferons remarquer que, dans Quinte-Curce, Amyntas est appelé frère d’Alexandre, bien qu’il ne fût que son cousin germain, du côté de son père. Ainsi l’Evangile a pu donner le nom de frères et de sœurs de Jésus à des personnes qui étaient simplement ses proches ; mais l’a-t-il donné réellement ? Il nous semble qu’il n’y a pas lieu d’en douter. — Toute l’antiquité chrétienne, comme le remarque justement D. Calmet, a toujours cru que Marie avait conservé sa virginité après, comme avant et pendant l’enfantement miraculeux de son divin fils Jésus. Quant à l’objection de quelques anciens hérétiques, tels qu’Eunomius et Helvidius, prédécesseurs des protestants et des rationalistes modernes, nous y avons suffisamment répondu (page 2), par des arguments qu’une saine critique ne saurait légitimement récuser. Toutefois nous croyons devoir en ajouter ici un nouveau en faveur de ceux de nos lecteurs qui ne sont pas étrangers à la philologie sacrée. Il est certain que le terme hébreu becôr, rendu dans le texte grec par prôtotokos, et, dans la Vulgate, par primogenitus ou premier-né, signifie proprement, comme phéter réhem (ou simplement phéter), qui lui sert souvent d’explicatif, fente, ouverture, et ce qui fend, ce qui ouvre un sein (quod aperit vulvam). Or il n’y a rien là qui prouve que la très sainte Vierge ait eu d’autres enfants après Jésus-Christ. — Nous ajouterons, avec Aberlé (Dict. de la Théol. cathol.), que si ces frères de Jésus-Christ, dont parle l’Evangile, avaient été ses véritables frères selon la chair, il serait très singulier que jamais Marie n’eût été appelée leur mère ; il serait tout à fait inconcevable que Jésus eût recommandé sur la croix sa mère à saint Jean (Jean, xix, 26, 27), tandis qu’ayant d’autres fils, c’eût été le devoir naturel de ceux-ci de la recueillir, et ils n’y auraient certainement pas manqué. — On ne voit dans le Nouveau Testament, comme fils de Marie, que Jésus, et c’est précisément par opposition avec ceux qui sont appelés ses frères, qu’il est désigné comme le fils de Marie (Marc, vi, 3). — La manière dont Jésus, du haut de la croix, recommande sa mère à saint Jean prouve encore qu’il était le fils unique de Marie, car il est dit littéralement : Voilà le fils de vous ; avec l’article déterminatif, qui aurait évidemment manqué, s’il y avait encore d’autres fils de Marie. — Un nouvel argument en faveur de notre thèse est la possibilité de démontrer quelle fut, en dehors de la très sainte Vierge, la véritable mère de ceux qui sont appelés les frères du Sauveur. Saint Matthieu cite (xxvii, 56), parmi les femmes présentes au crucifiement, une Marie, mère de Jacques et de Joseph; saint Marc le dit également (xv, 40), et, de plus, il distingue ce Jacques d’un autre Jacques, fils de Zébédée, par le surnom de le petit (o mikros) ou le mineur. Comme il ne paraît en général dans le Nouveau Testament que deux Jacques, il n’y a pas de doute que le premier ne soit celui que saint Paul nomme (Galat., i, 19) le frère du Seigneur, celui à qui sa position comme premier évêque de Jérusalem, donnait alors une haute importance ; celui enfin dont l’épître fait partie du Nouveau Testament. — Saint Jude, au commencement de son épître, se nomme frère de ce Jacques. Ainsi on trouve dans le Nouveau Testament pour trois des frères du Seigneur, Jacques, Joseph et Jude, une Marie qui est leur mère, et qui est différente de la mère de Jésus. Or, cette Marie est, sans aucun doute, identique avec la Marie nommée par saint Jean (xix. 23) la femme de Cléophas et la sœur de la mère du Seigneur. Cléophas, ou selon une autre forme de ce même nom, Alphée, était par conséquent le père de Jacques, de Joseph et de Jude ; et, en effet, Jacques est, en plusieurs circonstances (Matt., x, 3 ; Marc, iii, 18 ; Luc, vi, 15 ; Act., i, 13), nommé le fils d’Alphée. Pour Simon ou Siméon, il est expressément désigné comme le fils de Cléophas par Hégésippe, le plus ancien historien de l’Eglise. Il est donc incontestable que les quatre frères de Jésus étaient simplement ses cousins du côté de sa mère ; et si, d’après la donnée d’Hégésippe, Cléophas était un frère de saint Joseph, ils l’étaient aussi vraisemblablement du côté paternel. — On a objecté que deux sœurs vivantes n’ont pas pu porter le même nom. Mais il fallait prouver que cela n’avait jamais lieu chez les Juifs, surtout dans les dernière temps. Cet usage existait incoutestablement chez les Latins, puisque, sur les quatre filles qu’avait Octavie, la sœur de l’empereur Auguste, et qui vécurent en même temps, deux se nommaient, sans autre surnom, Marcella, et les deux autres Octavie. — On a dit encore que, d’après saint Hilaire, saint Epiphane, Théophilacte et plu-