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fin de roman

En attendant, il multipliait les déclarations d’amour. Ce soir-là — Luce devait s’en souvenir longtemps — l’aviateur s’était montré plus affectueux que jamais, il avait prodigué les protestations de tendresse. Luce vivait des minutes enchanteresses, elle était dans l’extase. Sa figure exprimait son bonheur.

— Ce soir, déclara le jeune homme, je veux goûter la plus grande joie de ma vie. Je sais que tu m’aimes, mais en plus de cela, je veux le don complet de ton corps.

À ces mots, Luce qui s’abandonnait à la douceur, à l’ivresse des baisers de son ami, eut un soudain recul.

— Non, pas ça, dit-elle. Je t’en aimerais moins. Pas maintenant. Lorsque nous serons mariés, je serai la plus aimante des femmes, mais d’ici là, je veux rester sage.

Mais Mérou insistait, se faisait plus pressant. Toutefois, Luce résistait à son amour qui la poussait à céder. Elle se sentait perdue, comme une personne qui se noie, mais elle refusait, résistait quand même.

— Écoute, déclara l’homme devenu soudain brutal, si tu ne veux pas, tu ne me reverras plus.

Alors, devant cette menace, la résistance de la fille croula…

À quelque temps de là, Luce constata qu’elle avait le corps tout couvert de taches roses comme dans les cas de rougeole. Inquiète, en revenant de son travail le soir, elle alla voir un médecin. C’était un vieil homme aux manières paternelles. Sur son ordre, elle dut se dévêtir. Elle avait une honte extrême de se sentir nue. Longuement, le praticien l’examina.

— Ma pauvre fille, fit-il d’un ton de profonde pitié, vous avez été contaminée. C’est un grand malheur qui vous arrive. Vous avez la syphilis, une vilaine maladie. Ça se