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fin de roman

— C’est bien triste pour ta mère, fait la tante.

— Qu’est-ce qui est arrivé ? interroge le fils qui ignore tout.

— Ben, elle a été frappée par une automobile et elle est morte, répond la tante toute glorieuse de l’informer de cette calamité.

Alors, sans un mot, le garçon s’éloigne, la tête courbée. Il s’en va vers la maison désormais vide de la présence maternelle.

Aujourd’hui, la tante a été témoin d’un accident dont elle pourra raconter tous les détails, elle a vu la voiture d’ambulance, le fourgon de la morgue et elle a annoncé au fils Demesse la mort de sa mère. Ce sera une journée mémorable.

Le coq

Lorsqu’il faut tout acheter, ça coûte cher de garder des poules, simplement une demi-douzaine et un coq. Elles donnent quelques œufs qu’on mange sans que ça paraisse, car il faut tout de même avoir de la viande. De la viande, la tante Françoise qui a quatre-vingt-quatre ans et la nièce Zelie en mangent trois fois par jour : au déjeuner, au dîner et au souper. Elles ne peuvent pas s’en passer.

Vers le milieu de septembre, Zélie faisait des calculs et elle se disait comme ça que ce serait plus profitable de se défaire des poules avant d’arriver à l’hiver. Mieux valait les manger que d’acheter du sarrasin à une piastre et demie le minot pour les nourrir. Et tout d’abord, elle commencerait par le coq. Ayant pris cette décision, elle voulut lui donner suite immédiatement. Appelant ses volail-