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fin de roman

Bonne fête

La tante Françoise aurait dimanche 85 ans.

Or, la veille, pendant qu’elle était allée à l’église pour l’office des quatre-temps, sa nièce confectionna un beau gâteau portant en sucre blanc l’inscription Bonne fête. À vrai dire, ce n’était pas l’affection qu’elle portait à la vieille qui l’avait portée à faire ce geste d’amitié, mais elle songeait toujours à la lointaine possibilité de recevoir, sinon tout l’héritage, du moins une partie des économies de tante Françoise. Lorsque celle-ci revint de l’église et qu’elle aperçut le superbe gâteau placé au centre de la table, elle jeta un regard mauvais à sa nièce.

— Qu’est-ce que c’est que ce gâteau ? demanda-t-elle d’une voix aigre.

— C’est le gâteau pour votre fête. Nous ne le mangerons pas aujourd’hui, mais ce sera notre dessert pour dimanche midi, répondit la nièce.

— Ben, tu pourras le manger seule, réplique la tante, car j’ai été invitée à dîner par ma cousine Mme Ratelle et j’ai promis d’y aller.

— Vous n’êtes pas obligée de manger ici. Si vous préférez aller ailleurs, vous êtes libre de le faire. Seulement, je savais que c’était votre fête et je vous avais fait un gâteau.

Le dimanche matin, la tante partit pour la messe et ne revint que vers le milieu de l’après-midi. Elle rapportait plusieurs colis.

Le gâteau fait par la nièce Zélie était encore sur la table, mais il avait été entamé. Il n’en restait que la moitié. La tante le contempla un moment, puis elle éclata :