Page:Laberge - Fin de roman, 1951.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
178
fin de roman

l’intérieur aussi. Tu sais, ces chaises et ce vieux sofa en crin qui sont dans le salon ne sont pas à la mode. Tu devrais les remplacer. Tu devrais acheter un ameublement moderne. Qu’est-ce qu’on a l’air avec ces vieux meubles qui viennent de ton grand-père ?

— Oui, vous voudriez me voir dépenser tout mon argent, me voir ruinée. Vous seriez contente alors. Ce n’est pas vous qui m’en donneriez. Bien, je n’en achèterai pas. Si vous voulez des meubles à la mode, achetez-en vous-même.

Signe de mortalité

C’était au printemps de la quatre-vingt-sixième année de la tante Françoise.

— Je vais préparer un carré pour semer des fèves, annonça-t-elle un matin à Zélie.

Alors, elle s’en fut au jardin avec une bêche et un râteau. Tout l’avant-midi, elle travailla la terre, la mettant dans le meilleur état possible.

— Je sèmerai les fèves cet après-midi, se dit-elle à elle-même.

Mais après le dîner, elle se sent si lasse, si faible, après la dure besogne de la matinée qu’elle décide de se reposer. Le lendemain et les jours suivants, elle vaque à ses occupations ordinaires. Puis, il pleut toute une nuit.

— Ça va faire germer les graines dans le jardin, remarque la tante.

À plusieurs reprises, elle va faire un tour, regardant si ses fèves lèvent. Pas la plus petite tige. Elle n’y comprend rien. Finalement, elle se met à fouiller le sol pour voir ce