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fin de roman

Par les matins gris, et sans un souffle de vent, la rivière parfaitement unie semblait plongée dans un profond recueillement, réfléchissait les arbres de la berge.

À certaines heures, la rivière se ridait mais une clarté courait à sa surface. On songeait alors à la figure ridée d’une aïeule illuminée par un sourire.

Le cadre de la Rivière Endormie : bordant ses deux berges de grands ormes centenaires dont le tronc, à quelques pieds plus haut que le niveau de l’eau, a été usé, déchiré, rongé par les glaces lors de la débâcle du printemps, des maisons en bois, en brique, en pierre, aux toits multicolores, et la grande route sur laquelle circulent les autos, les camions, les tracteurs et les charrettes.

La visiteuse et M. Lantier faisaient une promenade dans la campagne. Depuis une demi-heure, ils suivaient une étroite route bordée de grands vergers lorsqu’ils arrivèrent devant un vaste édifice religieux, surmonté d’une croix. Sur une longue véranda, des hommes paraissant plongés dans une grave méditation, faisaient isolément les cent pas tandis que d’autres absorbés dans des pensées profondes arpentaient lentement la pelouse sans se parler, sans se regarder, comme si chacun d’eux eût été un promeneur solitaire.

— Qu’est-ce que cette maison et que font donc ces gens ? interrogea Irene Dolbrook.

— C’est un monastère et ces hommes font ce qu’on appelle une retraite fermée. Ils méditent, ils songent à leurs erreurs passées et ils prennent des résolutions pour l’avenir.

— Exactement ce que je fais chez vous, déclara Irene en souriant, mais il me semble qu’il n’est pas besoin de