Page:Laberge - Fin de roman, 1951.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
19
fin de roman

Entendant le matin la mauvaise nouvelle à la radio, Paul Amiens accourut chez son amie pour la consoler, pour tâcher de la réconforter. Lorsqu’il entra, la mère éplorée lui cria : Nous ne devons plus nous revoir. C’est moi qui l’ai tué. J’ai été faible, je n’ai pas su tenir ma promesse. C’est là mon châtiment. C’est la dernière fois que nous nous voyons. Tout est fini. Adieu.

— Je ne peux accepter une décision prise dans un moment où ton esprit est troublé par le désespoir.

— Je ne veux plus te voir. Je ne veux plus t’entendre.

— Nous nous reverrons. La vie a encore de bonnes heures pour nous.

— Si tu cherches à troubler ma solitude, je me mettrai en pension dans une institution religieuse.

— Ta décision est irrévocable ?

— Elle est finale, irrévocable.

Pendant plusieurs semaines, Mme Louye fut accablée par une douleur intense, indicible. Amèrement, cruellement, elle se reprochait la mort de son fils. « C’est de ma faute, c’est de ma faute s’il a eu cet accident, s’il est mort », répétait-elle des douzaines de fois. « J’ai manqué à ma promesse et il a payé la rançon. Sa mort est ma punition, la punition de mes fautes. Mon Dieu, comme je regrette de ne pas avoir rompu avec cet homme que j’aimais et que je déteste aujourd’hui. Pardon, mon Dieu, j’ai été bien coupable. »

La malheureuse était accablée de désespoir.

Le temps passait, mais Mme Louye restait toute désemparée par la terrible épreuve qui l’avait si douloureusement frappée. Elle souffrait et elle était sans espoir. Désormais, sa vie était vide et aride comme un désert. Par moments, elle croyait expier ses fautes, mais elle avait beau