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fin de roman

cette vieille femme de quarante-cinq ans de faire un enfant dont ils ne voulaient pas ? Est-ce que je peux être gaie, aimable comme les autres ? Ah, la sale famille ! Aujourd’hui ces répugnants me trouvent trop désagréable pour manger avec eux, mais lorsque le temps sera venu, ils viendront me voir pour me demander de l’argent, ils viendront frapper à ma porte pour collecter. Ils se réunissent pour comploter et ce verrat de Guillaume cherche à me mettre la pension du père sur les bras. Oui, elle est riche. Ils s’imaginent ça eux. Mon mari retire un salaire juste suffisant pour faire vivre la famille. La maison n’est pas payée et les loyers servent à acquitter les intérêts et les taxes et un peu du capital. Quant à mon beau-père, il a un peu d’argent, c’est à lui et il le garde. Il ne le donne à personne.

Vers une heure de l’après-midi, comme Thérèse, son mari et les deux enfants, Fernand et Farina sortaient de table, le curé téléphona à son tour.

— Je t’appelle pour te dire que je pars demain pour retourner à Chicago. Alors, j’irai ce soir prendre le souper chez vous et vous dire adieu. Puis, je voudrais bien ravoir mon horloge à carillon. Souvent, j’y pensais et je regrettais de ne pas l’avoir. Tu l’as toujours, n’est-ce pas !

— Oui, elle est dans un placard et tu la prendras quand tu voudras. Où es-tu dans le moment ?

Au presbytère. Je ne suis pas mal ici. Tiens, dimanche, on nous a servi une poule tendre, succulente, comme je n’en ai pas souvent goûté. Ça tu sais, ça ravigote un homme. Bon, je suis très pressé. Je te verrai ce soir.

— Ben, mon vieux, si tu penses que je vais te faire manger une poule, tu te trompes, se dit la sœur en elle-même. Bien certain que je ne ferai rien de spécial pour toi. Tu mangeras le menu ordinaire, le menu de famille, et si