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LA SCOUINE

ment, rien n’y fit, et c’est avec ces mains noires que deux jours plus tard, elles prirent, en s’agenouillant, la nappe blanche de la sainte table.

Pour conduire ses filles à l’église ce matin-là, Deschamps avait attelé deux chevaux à sa voiture. Il avait aussi cru convenable de se coiffer pour la circonstances de son tuyau de noces. Après la cérémonie, il amena Paulima et Caroline auprès de la vieille femme qui, installée à côté du perron de l’église avec un grand panier de sucreries, faisait accourir tout le petit monde. Il y avait foule autour de la marchande. Au moment où Deschamps tenant les bessonnes par la main arriva au centre du groupe, il se produisit un incident qui causa tout un émoi. Un garçon de dix ans avait demandé cinq bâtons de tire. Lorsqu’il les avait eus, il était parti à la course, sans payer, se coulant à travers les paroissiens avec une agilité étonnante. La vieille était devenue toute rouge de colère.

— Si c’est pas honteux… un enfant qui vient de faire sa première communion, me voler comme ça ! s’exclama-t-elle.

Et elle rageait de son impuissance à ne pouvoir gifler le gamin.

Le père invitait ses filles à choisir dans la manne ce qui leur plaisait davantage. Caroline prit un bonhomme rouge et blanc, et Paulima, une palette de gomme et quatre pipes en sucre d’orge.

La classe de l’après-midi venait de commencer lorsque les bessonnes firent leur entrée à l’école en toilette de premières communiantes. Leur apparition fit sensation.

Toute de suite, l’institutrice alla vers elles et les embrassa.