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Page:Laberge - Quand chantait la cigale, 1936.djvu/34

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PROMENADE AU LAC


Les têtes blondes de Pierre et de Marcel m’apparaissent à la petite fenêtre de leur grenier lorsque j’arrive ce samedi matin. Leur sourire est comme un rayon de soleil et leur voix claire qui me souhaite le bonjour me met en joie.

Dearest prépare le déjeuner et nous mangeons avec appétit.

Nous partons ensuite pour une promenade au lac.

Pierre va en avant de nous. La démarche de ce petit être est un enchantement. Elle est souple, légère, comme ailée. Et cependant, l’allure est virile : le corps est droit, la tête légèrement renversée en arrière, mais sans rien de raide ou de lourd. Au contraire, l’on devine dans tous ses membres un fin ressort, une extraordinaire élasticité, comme chez un danseur émérite. Il joint en lui la grâce de l’oiseau à la beauté de l’athlète.

Nous laissons les maisons derrière nous, et nous allons dans la campagne, le long de la rivière. Nous cueillons des roses sauvages, des marguerites, des iris. Les arbres sont d’un beau vert, les champs sont tout fleuris. Nous allons dans un enchantement.

Au bord du lac, nous nous asseyons sur un tronc d’arbres et, ravis, nous regardons les flots qui viennent se briser à quelques pas. Pierre joue dans le sable, ramasse des coquillages et lance des cailloux dans l’eau.

Le lac paraît immense comme la mer. Il est agité et les vagues vertes et bleues qui viennent de si loin, déferlent sur le rivage avec une longue plainte monotone. Nous contemplons le spectacle en silence, car nos cœurs sont remplis par une émotion grave, profonde. Éblouis et tout vibrants d’une allégresse infinie, nous revenons par la route fleurie que nous avons suivie tout à l’heure.