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VISAGES DE LA VIE ET DE LA MORT

salon, au lieu d’être dans sa chambre, il guérirait. Pensez-vous que ça a du bon sens ?

— Oui, ça m’a l’air d’être un toqué ce docteur-là. Pis, il s’habille pas comme les autres, hein ? Il a un vieil habit, pis un chapeau à la mode d’il y a cinq ans. I charge-t-il cher ?

— Il prend deux piastres par visite.

— C’est pas cher comme les autres, mais s’il donne pas de remèdes, c’est encore trop cher. Tenez, ma belle-sœur, elle a été malade pendant dix-huit mois. Ben, vous m’croirez si vous voulez, mais après qu’elle a été enterrée, i avait une pleine armoire de fioles pis de boîtes de remèdes. Elle est morte, mais c’est pas d’la faute du docteur.

— Ben, le nôtre n’est pas comme ça.

— C’est curieux, vous il n’y a pas une personne en santé comme vous, tandis que vot garçon est toujours malade. Y en a-t-il des consomptifs dans vot famille ?

— Non, mais deux des sœurs de mon mari et sa mère sont mortes de consomption.

L’on était à la mi-septembre. L’état de Tout P’tit empira. La nuit, il dormait mal et il avait des sueurs froides qui mouillaient ses draps. Il eut plusieurs hémorragies. Alarmée, sa mère retourna voir le médecin.

— Il n’est pas allé dans les Laurentides ? demanda le praticien.

— Non, il veut pas y aller, répondit la mère.

— Si vous voulez le prolonger, il faudrait absolument, comme je vous l’ai déjà dit qu’il aille passer quelque temps dans les montagnes.

On l’envoya alors, dans un camp, à Valmorin. Les feuilles commençaient déjà à rougir et la grande féerie de l’automne approchait. Mais le temps qui était au beau