Page:Labiche - Le Voyage de monsieur Perrichon, Gage, 1905.djvu/51

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Madame Perrichon. — Qu’as-tu à lui reprocher ? Sa famille est honorable, sa position excellente…

Perrichon. — Mon Dieu, je ne lui reproche rien… je ne lui en veux pas, à ce garçon !

Madame Perrichon. — Il ne manquerait plus que ça !

Perrichon. — Mais je lui trouve un petit air pincé.

Madame Perrichon. — Lui ?

Perrichon. — Oui, il a un ton protecteur… des manières… il semble toujours se prévaloir du petit service qu’il m’a rendu…

Madame Perrichon. — Il ne t’en parle jamais !

Perrichon. — Je le sais bien ! mais c’est son air ! — son air me dit : « Hein ! sans moi ?… » C’est agaçant à la longue tandis que l’autre…

Madame Perrichon. — L’autre te répète sans cesse : « Hein ! sans vous… hein ! sans vous ? » Cela flatte ta vanité… et voilà… et voilà pourquoi tu le préfères.

Perrichon. — Moi, de la vanité ? J’aurais peut-être le droit d’en avoir !

Madame Perrichon. — Oh !

Perrichon. — Oui, madame !… l’homme qui a risqué sa vie pour sauver son semblable peut être fier de lui-même… mais j’aime mieux me renfermer dans un silence modeste… signe caractéristique du vrai courage !

Madame Perrichon. — Mais tout cela n’empêche pas que M. Armand…

Perrichon. — Henriette n’aime pas… ne peut pas aimer M. Armand !

Madame Perrichon. — Qu’en sais-tu ?

Perrichon. — Dame, je suppose…