Page:Laboulaye & Guiffrey - La propriété littéraire au XVIIIe siècle, 1859.djvu/649

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
621


CONVENTION NATIONALE.

SÉANCE DU VENDREDI 19 JUILLET 1793[1].

Rapport de Lakanal.


De toutes les propriétés, la moins susceptible de contestation, celle dont l’accroissement ne peut ni blesser l’égalité républicaine, ni donner d’ombrage à la liberté, c’est sans contredit celle des productions du génie ; et si quelque chose doit étonner, c’est qu’il ait fallu reconnaître cette propriété, assurer son libre exercice par une loi positive ; c’est qu’une aussi grande révolution que la nôtre ait été nécessaire pour nous ramener sur ce point, comme sur tant d’autres, aux simples éléments de la justice la plus commune. Le génie a-t-il ordonné, dans le silence, un ouvrage qui recule les bornes des connaissances humaines : des pirates littéraires s’en emparent aussitôt, et l’auteur ne marche à l’immortalité qu’à travers les horreurs de la misère. Eh ! ses enfants !... Citoyens, la postérité du grand Corneille s’est éteinte dans l’indigence !...

L’impression peut d’autant moins faire des productions d’un écrivain une propriété publique, dans le sens où les corsaires littéraires l’entendent, que l’exercice utile de la propriété d’auteur ne pouvant se faire que par ce moyen, il s’ensuivrait qu’il ne pourrait en user sans la perdre à l’instant même.

  1. Moniteur du dimanche 21 juillet 1793.