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davantage de regrets ; peu importait à la Virginie de changer de maître, pourvu qu’elle conservât ses libertés : c’était la seule chose qui l’occupât. Le seul point sur lequel elle insista auprès des commissaires chargés de l’enquête, c’est qu’on ne donnât pas un pouvoir absolu au gouverneur, et qu’on ne touchât pas à l’assemblée, rien ne pouvant mieux conduire à la satisfaction et à l’utilité du public ; ce furent les expressions des délégués.

La chute de la compagnie fut, tout bien considéré, un bienfait pour la Virginie. Une compagnie est le pire des souverains ; le gain, tel est le but pour lequel elle se forme et qu’elle poursuit uniquement. Mal administrés, les colons sont pillés par des agents infidèles ; bien administrés, ils servent d’instruments à l’avarice des associés. Quand c’est un individu qui commande, on peut espérer en son génie, en son amour de la gloire, en sa bonté ; sous un libre gouvernement, il est évident qu’un intérêt commun et permanent finira par triompher de toutes les difficultés ; mais une compagnie, sourde à la pitié, insensible à la honte, sans responsabilité, même devant l’opinion, sacrifie tout à son avarice : témoin la compagnie des Indes servie par des hommes tels que Warren Hastings, des hommes qu’un roi même ne maintiendrait pas devant le juste soulèvement de l’opinion.