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C’est ainsi que la doctrine puritaine, qui poussait à l’indépendance, à la souveraineté du jugement individuel, et qui par une conséquence naturelle conduisait à l’organisation de l’Église sur la base du suffrage universel, était par sa nature même un énergique instrument de liberté. Comment faire accepter les institutions de la monarchie absolue à des hommes qui, dans la ferveur de leurs convictions nouvelles, aimaient mieux mourir que de se soumettre à l’autorité d’une Église établie, et qui se croyaient martyrs en défendant les droits du jugement individuel, en d’autres termes, et sans en avoir conscience, les droits de la raison ?

Remarquez bien le rôle que joua la doctrine puritaine, rôle opposé à celui qu’a tenu le catholicisme, et vous comprendrez comment la religion a conservé tant de place dans la vie américaine. Chez nous, quand la raison a commencé de s’émanciper, elle a rencontré comme adversaire l’Église effrayée. Des deux parts, dans l’attaque comme dans la résistance, on a été à l’extrême, et ce n’est qu’après des luttes sanglantes qu’on a fini par comprendre que la foi et la raison ont des provinces distinctes, et qu’elles peuvent vivre l’une près de l’autre non-seulement sans se détruire, mais en se prêtant un mutuel appui.

En Amérique, le rôle du puritanisme a été tout