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un effort constant du parti démocratique pour faire que le suffrage soit aussi universel que possible et attaché à la seule condition de domicile ; mais ce n’est pas au point de vue de la théorie française qu’on demande cela, c’est au point de vue américain et anglais : tout le monde payant l’impôt, tout le monde doit voter.

La question du suffrage et de ses conditions se présenta à la Convention fédérale. Déterminer ce droit, c’était déterminer la forme même du gouvernement. Mais qui réglerait le droit électoral ? serait-ce le congrès ? serait-ce, au contraire, chaque État particulier ? Si c’est le congrès, disait-on, qui règle le suffrage universel, qui l’empêchera de rendre le gouvernement aristocratique ou démocratique en changeant les conditions du suffrage, malgré les États ? Qui l’empêchera d’établir un cens élevé en Rhode-Island ou de décider qu’en Virginie il n’y aura plus besoin pour voter d’être propriétaire ? Le congrès sera donc maître de renverser à son caprice toute l’organisation politique des États ?

Voilà ce qu’on redoutait du congrès. Si, au contraire, c’étaient les États qui réglaient le suffrage, on craignait de voir reparaître les jalousies particulières, et, à leur suite, la division. On mettra, disait-on, des conditions dures pour l’exercice du droit électoral, et on aura de petites aristocraties qui seront maîtresses du gouvernement ; les États reprendront ainsi par un autre bout la souveraineté qu’on veut leur enlever.

La question était délicate. On se tira d’affaire par une transaction ingénieuse. Le congrès sentait qu’il ne pouvait faire une loi universelle ; car, si on fai-