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Cette fois, ce qu’on voulut créer par une loi, ce fut une aristocratie. On décréta qu’il y aurait une pairie héréditaire, sans en avoir les éléments, si bien que l’on composa le pouvoir législatif de deux forces dont l’une n’existait pas.

En 1814, Montesquieu avait remplacé Rousseau ; l’Esprit des lois était en faveur. Montesquieu avait observé la constitution anglaise. Il y trouvait trois pouvoirs : royauté, aristocratie, peuple ; puis, regardant l’antiquité, il remarquait que l’accord de ces trois pouvoirs avait été le rêve de Cicéron et d’Aristote. Mais si Montesquieu, au lieu de s’arrêter à la forme anglaise et de supposer que le pouvoir aristocratique ne pouvait exister qu’avec l’hérédité, eût remonté jusqu’aux anciens, qui ont étudié les choses sur place et ont pu faire des observations sur le vif, il aurait vu qu’Aristote ne ramenait pas tout à l’hérédité. Aristote fait cette observation très-juste que si vous avez un État où le pouvoir ne représente qu’un seul des trois éléments de la société, vous avez un mauvais gouvernement. Il faut, par exemple, en tout pays, que les talents et les grands intérêts soient à la tête de la société. Si vous êtes gouverné par des gens incapables ou intéressés au désordre, votre gouvernement ne marchera pas. Mais si vous donnez aux hommes capables et aux riches tout le pouvoir votre organisation sera une mauvaise forme de la tyrannie, c’est-à-dire une oligarchie. Il faut aussi que le peuple tienne sa place, que sa voix soit écoutée. Si on ne l’écoute pas, on abusera de l’argent et du sang de la nation. Mais si vous donnez tout au nombre et