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c’est le Sénat. On voulut d’abord le faire viager : c’était l’idée d’Hamilton. On avait devant soi l’exemple de l’Angleterre, la grandeur de la Chambre des lords ; il semblait nécessaire d’avoir un pouvoir qui durât toujours. On ne se rendait pas compte que ce serait constituer une aristocratie dans un pays qui la détestait. Les Américains ont trouvé le moyen de ménager le principe de perpétuité et le principe électif, et cela par le moyen suivant. Le Sénat est permanent ; mais chaque sénateur n’est nommé que pour six ans, et le Sénat se renouvelle par tiers tous les deux ans ; en d’autres termes, tous les deux ans il y a un tiers des sénateurs, c’est-à-dire vingt-deux sénateurs qui se retirent. On a pris soin que, parmi les vingt-deux sénateurs sortants, il n’y en ait pas deux qui soient du même État. Il y a donc vingt-deux États différents qui, tous les deux ans, renouvellent une partie de leur députation.

L’expérience a prouvé que jamais la proportion des sénateurs non réélus ne dépassait la moitié de l’élection. Il en résulte donc que tous les deux ans il y a tout au plus un sixième du Sénat qui se renouvelle. Or une assemblée peu nombreuse, qui se renouvelle aussi insensiblement, est, à vrai dire, permanente ; elle n’est pas troublée par l’arrivée des nouveaux venus. Quel que soit son talent, quand un homme entre dans le Sénat américain, il lui faut quelque temps pour prendre les habitudes de l’assemblée, et savoir à qui il peut se joindre ; il ne peut y prendre de suite cette influence qui est si fréquente dans les grandes assemblées renouvelées, où un homme nouveau peut entraîner la foule. Il y a