Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dectes (en 1506) et E.-G. Hardy a retrouvé à la Bibliothèque Bodléienne d’Oxford, en 1889, un grand nombre de variantes que Budé lui-même avait notées d’après ce Parisinus.

Il serait donc impossible de condamner globalement le recueil des lettres de Pline à Trajan, et personne ne s’y risque plus aujourd’hui. Mais il subsiste encore quelques vestiges de défiance à l’endroit de la lettre relative aux chrétiens[1].

Une raison très forte milite pour l’authenticité. Dès la fin du second siècle de notre ère, en 197, Tertullien citait la lettre de Pline, au chapitre ii de son Apologeticus, en des termes si précis qu’évidemment il l’avait sous les yeux :

Pline le Jeune, alors qu’il administrait une province, condamna quelques chrétiens, il en délogea d’autres de leur position [c’est-à-dire : il les contraignit à l’apostasie] ; puis, effrayé tout de même de leur grand nombre, il consulta l’empereur Trajan sur ce qu’il devait faire désormais. Il lui exposait qu’à part l’obstination des chrétiens à ne pas sacrifier, il n’avait pu découvrir, au sujet de leurs mystères, autre chose que des réunions tenues avant le jour pour chanter des cantiques en l’honneur du Christ et de Dieu[2], et pour resserrer les liens d’une discipline qui défend l’homicide, l’adultère, le vol, la perfidie et tous les autres crimes…

Tertullien résume avec fidélité les premiers paragraphes de la lettre. Et ce qui prouve que celle-ci circulait dès cette époque, c’est que le traducteur qui entreprit de mettre l’Apologeticus en grec, peu après l’apparition du

  1. Par ex. E. Havet, le Christianisme et ses Origines, t. IV, p. 421 ; Ch. Guignebert, Tertullien…, p. 77 et s. ; A. Drews, Die Petruslegende, Iéna, 1924. Aubé a annulé ses réserves dans la seconde édition de son Hist. des Perséc. de l’Église jusqu’à la fin des Antonins, 1878, p. 218.
  2. Les manuscrits de l’Apologeticus portent et deo ; on attendrait ut deo, correction généralement acceptée par les éditeurs modernes.