Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/121

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XXVIII


 
Tout enfant, je t’aimais, ô Nature ! et songeur,
Sur les monts égarant mon jeune ennui rongeur,
J’écoutais les torrents dans leur chute pareille,
De loin, je leur prêtais une rêveuse oreille,
Et je venais m’asseoir à l’ombre des grands bois
Pour me bercer longtemps aux plaintes de leurs voix ;
Et lorsque à l’horizon la vague orientale
De l’aube reflétait la blancheur sidérale,
Quand le matin humide et riant sous ses pleurs
S’enivrait de parfums sur la lèvre des fleurs,
Émergeant de la nuit, resplendissante et pure,
J’aimais à contempler ta jeunesse, ô Nature !

Tout ce qui vit, buvant l’âme du dieu du jour,
Semblait s’épanouir sous des regards d’amour :
Les forêts agitaient leurs vertes chevelures
Exhalant dans les airs d’ineffables murmures ;
Et du ciel aspirant les naissantes chaleurs,
Les vallons s’emplissaient d’accords et de senteurs.