Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/171

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Mais adieu ! — Sur mon ciel, si sombre par instants,
J’ai peut-être arrêté vos regards trop longtemps ;
Pardonnez cette plainte à des lèvres mortelles,
Et vers des cieux plus doux laissez monter vos ailes.
Que ne m’est-il donné d’accompagner vos pas !
Mais pour m’en consoler, — vous ne l’oublierez pas,
O mon poète ! ô vous dont la muse docile
Embellit ses beaux vers d’une rime facile ;
Vous dont le rythme plein de grâce et de clarté
Reproduit vos pensers dans leur limpidité ;
Vous qui savez toujours, sobre dans l’abondance,
Bercer vos rêves purs de nombre et de cadence ; -
Oui ! pour m’en consoler, vous me direz ces lieux
Qu’ont habités les arts, les héros et les dieux ;
Où la gloire a porté ses rameaux jusqu’aux astres ;
Où désormais, hélas ! tout est deuil et désastres !
Ce ciel où, s’éteignant avec la liberté,
Tout flambeau s’est couché, le soleil excepté !
Dites-moi, dites-moi l’éclat dont la nature
Revêt ces bords sacrés à toute créature !
Mais, à l’heure où s’éteint le jour silencieux,
Quand l’ombre est sur les monts, quand l’étoile est aux cieux,
Allez cueillir pour moi près du golfe tranquille
Un rameau sur la tombe où dort le doux Virgile !


Paris, février 1840.