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Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/28

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L’onde est pleine d’écueils qu’on ignore à ton age :
Le chant de la sirène attire ; sous le flot
Crains de trouver la tombe, imprudent matelot !

LE FILS

Que sous l’onde en fureur le faible sombre et meure,
Qu’importe ! l’homme fort lutte, dompte et demeure !
Vers l’inconnu prenant un vol audacieux,
Sondant les profondeurs de l’abîme ou des cieux,
Il reviendra vainqueur ! et, debout sur les cimes,
Nouveau prophète au front plein de lueurs sublimes,
Aux peuples prosternés il dira ses travaux,
En leur léguant des lois ou des mondes nouveaux !

LA MÈRE

Mais il faut un Moïse à toute œuvre divine !
Malheur à l’insensé dont l’orgueil se devine,
Qui, rêvant pour ses jours un périlleux labeur,
Ose envier leur rôle aux hommes du Seigneur !
A leurs vastes travaux Dieu mesura leurs forces.
C’est lui qui fait au chêne aux robustes écorces
Sa racine profonde et ses rameaux puissants
Pour porter sans fléchir la colère des vents.
Mais, prodigue envers tous, toujours bon, toujours juste,
Il donna la faiblesse et la grâce à l’arbuste.
Tout est grand à sa place ; ici-bas et là-haut
Chaque chose concourt à l’œuvre du Très-Haut.
Il dit à l’arbre altier : « Lutte avec la tempête ; »
Au roseau : « Sous les vents plie humblement la tête. »

LE FILS