Page:Lacaussade - Poésies, t2, 1897.djvu/298

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Il neige ; à mes carreaux la bise siffle et pleure.
Sous des cieux incléments qui t’a donc exilé ?
Viens à moi, ne crains rien ! — Dans mon humble demeure
Soyez le bienvenu, compatriote ailé !

O bonheur de te voir ! ô fortune imprévue !
Viens sécher sur mon sein ta plume sans chaleur.
Un passé radieux se réveille à ta vue,
Et tout mon pays d’or se lève dans mon cœur.

Comme deux chers amis qu’un même exil rassemble,
Comme un fils de ma mère assis à mon foyer,
Du val des lataniers, oiseau, parlons ensemble ;
Chantons, doux bengali, chantons pour oublier !

Chante ! et je reverrai nos profondes vallées.
Chante ! et je revivrai mon bel âge effacé.
Souvenirs ! frais parfums des choses envolées,
Embaumez le présent des bonheurs du passé.

Voici la mer lointaine aux rumeurs éternelles ;
Là-bas, j’entends gronder le torrent orageux ;
Plus loin, c’est la montagne aux crêtes fraternelles
Dans le saphir de l’air dressant leurs fronts neigeux.

L’aube se lève, un air transparent nous inonde ;
Pour aimer et bénir tout semble s’éveiller !
Sous un ciel aussi pur qu’il est doux d’être au monde !
Chantons, ô bengali ! chantons pour oublier !